Je suis loin de l’actualité en parlant aujourd’hui de Potiche. Ce 12ème long métrage de François Ozon sorti en 2010. Mais, peu importe. Quel titre ! Celui d’un film donc, et du statut de son personnage principal, interprété par Catherine Deneuve.
En 1977, dans le nord de la France, Robert Pujol est détestable. Il tient son usine de parapluie d’une main d’acier, et dirige sa famille à la baguette, tout en sautant joyeusement sa secrétaire dès qu’il en a le temps. Forcément, dans un rôle pareil, Fabrice Luchini est parfait. À force de se comporter comme un mufle avec eux, ses ouvriers se mettent en grève et le séquestrent. La revanche des femmes s’amorce. Devant les faits et l’impossibilité de travailler du patron, Suzanne Pujol – jusque là, épouse insignifiante, vouée à l’exclusive réussite de son mari et de ses enfants – prend les rennes de l’entreprise et s’impose rapidement en patronne appréciée de tous, comme l’était son propre père.
Potiche est une comédie savoureuse devant laquelle il serait dommage de bouder son plaisir. L’interprétation des comédiens est brillante de justesse. De Karin Viard en secrétaire – mademoiselle Nadège – qui s’émancipera au contact de la nouvelle patronne, à Judith Godrèche – Joëlle Pujol, l’insupportable fille à papa qui, tout en sourire, est une conservatrice radicale. Quant à Catherine Deneuve, fidèle à son talent légendaire, elle maîtrise tous les registres qui la font passer de la bourgeoise sotte à la dirigeante charismatique. Je ne suis pas trop fan de ragots, mais a-t-elle forcé sur le Botox ?
Les femmes mènent le bal donc, sans effacer les hommes. Gérard Depardieu, en vieil amant de Catherine Deneuve parvient à laisser image et ego de côté. La sensibilité simple qu’il traduit rend son jeu tout à fait crédible. Même Sergi Lopez, pourtant à l’écran quelques instants seulement, est authentique.
Des dialogues truculents, des décors hilarants… A-t-on vraiment envie de se souvenir que le papier peint qui ornait notre salon était le même que celui du film ? Catherine Deneuve en survêtement Adidas rouge, un fichu sur la tête qui protège sa mise en pli et un tablier de cuisine… Fallait oser. C’est vraiment une comédie sympathique, qui ne se prend pas au sérieux et qui aborde des sujets… à mon humble avis, toujours d’actualité: place des femmes dans la famille, dans l’entreprise, en politique – ce serait Ségolène Royal qui aurait inspiré le personnage de Suzanne Pujol, leur difficulté à s’affranchir de la culture et des préjugés, leurs nombreuses qualités larvées derrière une insignifiance obligatoire. Après, on peut se contenter d’1h43 de plaisir.
Je n’ai pas vu beaucoup de films de François Ozon – Sous le sable et 8 Femmes, mais chacun à sa manière m’a marquée. Réalisateur qui ajoute chaque année un nouvel opus à sa filmographie, il s’est clairement amusé pendant le tournage de Potiche. Du coup, les spectateurs embarquent spontanément dans cette comédie baroque, librement inspirée d’une pièce de théâtre.