5285 euros. Le prix d’un tour du monde. Calcul à la louche : Paris-Addis Ababa-Mumbai-Bangkok-Tokyo-Bali-Fidji-Auckland-Papeete-Lima-Sao Paulo-Lisbonne. Le logiciel de Star Alliance pour un embarquement immédiat.
Probablement un rêve qui ne se réalisera pas. Qu’importe. Le temps de l’imaginer, je décolle. Je monte sur mon tapis volant. J’imagine les couleurs, le vent, jusqu’aux odeurs. Les villes m’éclaboussent de poussière. Le soleil me laisse suffocante. Je transpire. La torpeur de l’après-midi.
J’entends les rire des enfants, les cris des femmes, le chahut des hommes. Les tissus bruissent. Les braseros illuminent la nuit. L’écho des télés minuscules qui diffusent des matchs de foot sur la place du quartier. Les palmiers qui se froissent. Souvent, la musique.
Les pas sur le sable, sur la terre battue, dans la boue. Le clapotis de l’eau, l’écume des vagues. Partout les coqs qui chantent avant de finir au chaudron. L’odeur de charbon de bois, d’écorces de fruits brûlées, d’encens, de terre mouillée, de saleté, de moisissures. L’air est saturé, la ville grouille.
Mouvement permanent entre la découverte inattendue et les points de repère rassurants. Entre les signes de bienvenue et le rejet plus ou moins explicite, les gens me regardent, me touchent, m’accueillent, me parlent. Porte-monnaie ambulant. Blanche. Blonde. Un jeu ? Personne n’est dupe.
Le jour se lève. J’émerge, dans mon lit. 5285 euros. 561 heures au salaire minimum. Quatre mois de boulot à temps plein.